Nébuleuse

C’est plus beau que Rio. Et c’est là, sous mes yeux. Depuis toujours. Toutes les nuances de bleu et les montagnes et les tout petits nuages. Et le couché de soleil au bout du lac, chaque soir incroyablement unique. C’est plus beau que Tokyo. C’est plus beau que n’importe quel long courrier qui survole des destinations inconnues. C’est plus beau que San Francisco. C’est plus beau que n’importe quoi et c’est là. Et il aura fallu mille voyages lointains pour découvrir l’évidence de la proximité. Il aura fallu voir mille paysages sublimes pour comprendre que la beauté était ici. Il aura fallu photographier mille scènes de vie exotiques pour voir, enfin, ce que je ne prenais plus la peine de regarder.

Tu te souviens. Tu te souviens, comme chaque année on allait dans le champ à côté regarder les étoiles, les herbes nous piquant les mollets. Tu m’expliquais les constellations, la voie lactée. L’univers.

La Grande Ourse.

Et derrière les tilleuls, tu me montrais Cassiopée. Et chaque année, tu devais me ré expliquer la Terre qui est ronde et qui tourne autour du soleil. La gravitation. Toutes ces choses qu’on apprend à l’école et qu’on ne questionne pas. Et je t’écoutais. Et je te croyais. Je croyais tout ce que tu disais. Encore aujourd’hui. Mais, je n’étais jamais totalement convaincue que la Terre était vraiment ronde. Et qu’elle tournait vraiment autour du soleil.

Andromède.

Tu me disais que sans les lampadaires du village en contrebas, on en verrait encore plus des étoiles. Des milliards. Et je m’imaginais, un jour, dans le noir absolu, éblouie par toutes ces lumières venues d’un autre monde. Les satellites tournaient très vite au dessus de nos têtes, dans une course effrénée vers le rien. Ah oui, il y avait les trous noirs aussi. Et les galaxies. Et l’infini fini. Là, j’étais complètement larguée mais je t’écoutais, fascinée. Pour toi, c’était normal un infini fini. Ca avait un sens. Pour moi, déjà, rien ne faisait sens, ni les étoiles, ni les herbes hautes, ni la vie. Juste toi.

Le cygne.

Les herbes ont poussé dans le champ à côté, on ne pourrait plus s’y coucher comme avant. Et je l’ai vue, la Terre. Mais je n’ai rien vu. Et dans la nuit profonde de la steppe infinie, il n’y a pas plus d’étoiles. Et dans l’hémisphère Sud, il n’y a pas de Toucan, pas de Centaure, pas de Boussole. Et où que j’aille la vie ne fait pas plus sens qu’ici. Et les nuits étoilées du monde entier crient le vide en nous. Et je ne suis pas encore tout à fait sûre que la Terre tourne. Et que les étoiles existent. Juste toi.


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