Apocalypse now (seriously, now)

 

Half-nerd, half-hipster, les deux mecs de Bellflower sont parfaitement dans l’air du temps. Tellement parfaitement que cela en devient suspect. Dès les premières minutes. Entre une musique folk trop indé pour être honnête et des intertitres faussement inspirés, l’artifice transpire. C’est beaucoup trop recherché pour être vraiment brut, comme une coiffure out of bed qu’on mettrait des heures à faire devant sa glace le matin…  Saturation, jaune baveux, surexposition, grain, comme si on n’était pas assez malade avec les Iphone, Bellflower est le premier film de cinéma hipstamatic.

Il y a un moment dans le film, c’est vrai, un court moment, où je me suis dit que, si on voulait, on pouvait y voir une peinture du white trash d’aujourd’hui. Une vision noire et profonde d’une jeunesse décadente. Quand une soirée entre amis, un amour naissant, une amitié sans faille, une matinée de détente, une virée en bagnole, quand tout se résume à du binge drinking, je me suis dit que la critique sociale pointait. La jeunesse perdue, élevée par la télé, livrée à elle-même. Sauf que Woodrow et Aiden ne sont plus des gosses. Ils ne vivent plus chez leurs parents et ils ont connu les cassettes VHS. Ils ne sont plus jeunes, ils sont juste des adolescents attardés. Et pour que le film soit une critique de la société, il faudrait déjà qu’il ne soit pas aussi nombriliste.

Comme quand on voit, à plusieurs reprises, que Bellflower est un nom de rue, pour nous faire croire que ce film est universel et parle de l’Amérique profonde, alors que c’est juste l’histoire d’un mec paumé. L’acteur-réalisateur-scénariste-bricoleur-producteur joue un personnage inspiré de sa propre histoire, how fucked up is that?

On connaissait par cœur la scène où le personnage central se rase la tête, pour défier la vie, pour montrer qu’il devient un autre, un guerrier. Ici, même s’il construit un lance-flammes, le héros n’est pas aussi radical et nous donne à voir une scène incroyable de ridicule, où il se rase la barbe ! Plus de tête en poils, voilà qui va faire réfléchir tous les branchés du coin…

Mais même si on rigole un instant devant ces abrutis restés scotchés trop longtemps devant Mad Max, il ne suffit pas d’une caméra pour faire un film, aussi customisée soit-elle. Incapable de choisir une fin à une histoire déjà bancale, le réalisateur-acteur-whatever préfère nous proposer différentes séquences, comme des clips cheap, d’évènements qui arrivent, n’arrivent pas, sont importants, sont passés de puis longtemps… L’envie de tout dire dans un son premier film sûrement, mais tout ce qu’il avait à dire est finalement bien affligeant car ce film, ce n’est rien d’autre que l’histoire d’un mec qui se fait larguer. Donc l’apocalypse oui, mais seulement une apocalypse égo-centrée.


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