Pas un polar

Il fait jour. Il fait jour et il fait beau. Ca parait déjà presque suspect. Dans ces cas là, il fait toujours nuit. Il fait froid. C’est le creux de l’hiver et la pluie glaciale fait briller les petits pavés d’une impasse immobile. Mais aujourd’hui il fait beau. Et quand je rentre dans l’appartement, il n’y a pas de cette poussière en suspension qu’on voit souvent dans un rayon de soleil quand il devient rasant. Il n’y a pas d’odeur sordide ni même de tension palpable. On m’ouvre la porte gentiment quand je pénètre dans l’appartement. Et dans l’appartement, il n’y pas de chaos, pas de trace de lutte, pas de trace d’effraction. Les rideaux sont ouverts, le salon est bien rangé. Accueillant. Dans la pièce, je ne trouve que des choses élégamment banales, un mobilier discret, des livres intelligents. Les flashes répétés me donnent l’impression qu’on fait un reportage pour un magazine de décoration. On ne déplace rien, tout est parfaitement à sa place. On marche sans bruit. On tourne autour de cette petite sculpture qui semble sortie des collections du Quai Branly, toute ronde et pointue d’un côté, taillée dans une pierre qui résiste au temps et aux chocs. Ca pourrait être la principale attraction de la visite.

Je regarde autour de moi, je pourrais simplement être en visite chez une amie. Mais une amie morte alors. Une amie morte à mes pieds. Une amie avec le crâne grand ouvert et des milliers de bouts d’os et de cervelle répandus comme une couronne. Une amie avec la tête baignant dans une marre de sang noir et luisant sur le parquet ciré. Une amie avec un visage livide presque blanc, dont l’éclat rayonne dans toute la pièce quand la lumière se pose finalement sur lui. Ca commence, maintenant.


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